352. En direct de 'la philo' (1)

Il est 7:35 du matin quand je ferme la porte derrière moi et prends le chemin du lycée. Même la joyeuse équipe de couvreurs qui ont entrepris de démolir totalement le toit de la maison d'en face en faisant le plus de raffut possible ne sont pas encore arrivés. Dommage. Je pars donc la tête basse sous un merveilleux ciel bleu.

Je suis assez fière de moi quand j'arrive à 7:30 pétantes pour récupérer la pochette avec les fameux sujets de philosophie. Je soupire car je me souviens avec nostalgie du temps où les enveloppes scellées étaient ouvertes sous les yeux d'un élève innocent pris au hasard. 

'Bonjour.' Je dis en serrant les dents. Je garde une certaine rancune envers ces deux personnages et tiens à le leur faire savoir.

'208.'

Chef et sous-chef s'affairent: ils étalent des paquets de dossiers, les empilent, semblent vouloir les trier selon une logique qu'ils ne semblent pas maîtriser. J'ai l'impression qu'ils ne sont pas du tout contents d'avoir une prof exemplaire comme moi qui arrive bien à l'heure alors qu'ils ne sont visiblement pas prêts. Je retiens juste à temps le commentaire 'Mais vos appartements de fonction sont juste au dessus.' 

'Nous vous les apporterons dans les salles.'

Je les laisse donc avec leurs dossiers et refais tout le trajet en sens inverse jusqu'aux grands escaliers puis prends le raccourci vers la salle 208. Les néons ne se mettent pas en route et je dois chercher la porte de sortie vers le couloir 200 à tâtons dans l'obscurité totale. J'évite de justesse de me cogner la tête sur le montant de la porte. Je me retiens de m'exclamer tout haut contre ce mauvais agencement des raccourcis. Inutilement d'ailleurs car le couloir est vide. Seule tout au bout une surveillance attend en haut des marches, droite comme un I. Je me retiens de lui dire qu'elle a oublié son couvre-chef à fourrure d'ours. (Elle est habillée en rouge et noir.) Aux abord de la 208 un plateau avec un thermos de cafés et une dizaine de parts de gâteau posées sur une assiette et recouverts de film alimentaire. Je prends le temps d'enlever le film, de me servir et de remettre le film.

J'ouvre la porte et m'installe au bureau. Premier arrivé, premier servi. J'ouvre les fenêtres, tire les rideaux, pose mes parts de gâteau sur une serviette en papier sur le bureau à côté de ma - minuscule - tasse de café.

C'est alors que je suis fin prête que les élèves arrivent - le garde de Buckingham a bien fait son travail - suivis par un de mes collègue, légèrement bedonnant. Celui-ci s'installe de suite au bureau.

'Jai pas mal de papiers à faire. Je pars à la retraite.' Dit-il en repoussant mes gâteaux, ce qui me rassure quand même. Je récupère vite les parts de gâteau et la tasse de café et ... et ... il n'y a pas de chaise ni de table pour le deuxième surveillant! Je repose mes précieuses victuailles sur le bureau en adressant un regard menaçant à mon collègue et pars dans le couloir à la recherche d'une table et d'une chaise. Je reviens avec la table à bout de bras et me demande si mon collègue se comportera en gentleman. Pas du tout. Je m'installe dans le coin à gauche de la porte d'entrée. Pendant que les élèves s'installent je sors dans le couloir voir avec qui je pourrais papoter peu avant l'épreuve. Je suis en plein commérage avec ma meilleure comparse en la matière quand M le Chef apparaît soudain derrière nous. Il agite les bras dans tous les sens (normal donc on ne réagit pas) et parle apparemment tout seul.

'Vous avez distribué les sujets?'

Nous voici rappelées à notre devoir, nous faisons volte-face. Je m'aperçois alors que mon collègue a déjà commencé à distribuer les sujets!!!! Je me souviens avec nostalgie du temps où les proviseurs donnaient un coup de sifflet au bout du couloirs pour signaler le départ de l'épreuve. 

Je me saisis de la pochette pour en extraire la liste d'émargement et commencer les verifications d'identité. Ah! Surprise! Il n'y a pas de liste d'émargement. Une liste est collée sur la pochette et je vais donc faire signer sur celle-ci. Ces doit être soit à cause des 'restrictions budgétaires' comme m'explique mon collègue, soit une histoire de sauvetage de planète ... 



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